Une acropole est, étymologiquement, une « ville haute ». Celle d’Athènes, juchée sur une colline qui culmine à 156 mètres d’altitude, a derrière elle une longue histoire.
Elle naquit huit siècles avant notre ère. Son plateau accueillit d’abord une forteresse ; il se transforma par la suite en sanctuaire. En 490 av. J.-C., les Athéniens rasèrent leur temple de cent pieds, l’Hécatompédon, et, sur base de colossales fondations, ils entreprirent l’érection d’un nouveau temple aux dimensions formidables, connu aujourd’hui sous la dénomination de Préparthénon. Ce monument resta inachevé, victime du sac des Perses en 480 av. J.-C.
Trois générations d’Athéniens se relayèrent ensuite pour donner au site son visage définitif. Sous Cimon, ils déblayèrent les débris et s’en servirent pour élargir le plateau et construire une enceinte. Sous Périclès, ils érigèrent les Propylées et le Parthénon. Sous Nicias, ils achevèrent l’Érechthéion et le Temple d’Athéna Nikè.
Le Parthénon était, dans ses premières années, un temple consacré à la déesse Athéna, protectrice de la cité et déesse de la guerre et de la sagesse. Chevillée à son corps, l’histoire lui offrit bien des masques et des souffrances.
Dès le début, le monument ne se limita pas à une fonction religieuse ; il servait aussi de trésor. L’adyton regroupait à la fois les fonds de la ville d’Athènes et de la Ligue de Délos, composés essentiellement de métaux précieux. La statue d’Athéna exposée dans le naos, une sculpture chryséléphantine de onze mètres et demi de haut attribuée à Phidias et aujourd’hui disparue, renfermait à elle seule plus de mille cent cinquante kilos d’or.
Au troisième siècle de notre ère, un incendie probablement provoqué par des pirates hérules ravagea le Parthénon. Son toit s’effondra et la chaleur intense fissura nombre de ses éléments en marbre. Il fallut attendre un siècle pour voir l’édifice restauré. Des colonnes du naos furent remplacées ; le toit refait ne couvrit plus que l’intérieur, laissant découvert le péristyle.
À la fin du cinquième siècle, après près de mille ans dédiés au culte d’Athéna, le temple perdit sa fonction de temple ; cent ans plus tard, il fut transformé en église et son entrée principale passa d’est en ouest. Plusieurs éléments païens attachés à l’édifice, comme une partie des statues ou des métopes, furent détruits.
Quand en 1456 Athènes fut conquise par les Ottomans, ceux-ci convertirent aussitôt le Parthénon en mosquée et le clocher en minaret.
Puis, en pleine guerre de Morée (1684-1699) survint le drame. Les forces ottomanes, qui venaient de perdre le Péloponnèse, évacuèrent Athènes et se fortifièrent dans l’Acropole, se servant du naos comme poudrière. Le 26 septembre 1687, un tir de mortier des troupes vénitiennes mit le feu aux poudres et l’explosion consécutive provoqua l’effondrement du toit, des murs et de vingt et une des quarante-six colonnes. Dans la foulée de sa victoire, le futur doge Francesco Morosini, désireux de s’octroyer comme butin les statues d’Athéna et de Poséidon, fit s’effondrer tout le fronton ouest.
Le Parthénon n’était plus que ruines — des ruines qui allaient se mettre à voyager. En 1688, les Ottomans se réinstallèrent à Athènes et réemployèrent les débris dans la construction des maisons et d’une petite mosquée à l’emplacement de l’ancienne. Dans les années qui suivirent, les voyageurs occidentaux ne se privèrent pas pour se servir eux aussi dans les décombres et emporter dans leurs bagages un petit souvenir du passé. Au début du XIXe siècle, l’ambassadeur britannique à Constantinople Thomas Bruce, dit Lord Elgin, envoya à Londres l’essentiel des sculptures en marbre de la frise, des frontons et des métopes, qui sont exposés depuis plus de deux siècles au British Museum.
Après le tremblement de terre de 1893, une première série de travaux eut lieu sous l’égide de l’architecte grec Nikolaos Balanos, puis, dans le dernier quart du XXe siècle, débuta une vaste entreprise de restauration du Parthénon. Plus de cent mille fragments de marbre jonchant le sol furent soigneusement recensés et le plus grand puzzle au monde se compléta peu à peu. Les parties à jamais perdues furent remplacées par des pierres dont la blancheur contrastait avec les éléments d’origine, conformément aux instructions de la charte signée en 1964 à Venise (l’histoire est facétieuse). Seules quatre ou cinq colonnes n’ont pas encore été reconstituées.